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 Quelques articles que votre serviteur a écrit et qui ont déjà été publiés sur le premier portail d'information du Burkina Faso, www. lefaso.net


Ambroise Tapsoba : Et la parole s’est faite homme !

Une maîtrise peu commune du langage parlé“, voici ce qui caractérise ce guerrier de la parole que l’on ne présente plus au pays des Hommes intègres. Maître de cérémonie, animateur, traducteur, homme d’affaires et bientôt patron de presse, Ambroise Tapsoba est tout cela à la fois. Il a le don du verbe, mais pas seulement ; profondément attaché au « burkindi » (intégrité en langue mooré) comme il le dit lui-même, c’est l’élan de solidarité qui le pousse vers ses congénères et qui lui donne cette perpétuelle bonhomie que l’on lit sur son visage.

De nos jours, c’est incontestablement le meilleur traducteur en langue mooré. Ses traductions, appuyées par des proverbes bien à propos et faites avec une certaine emphase sont souvent plus applaudies que les discours eux-mêmes. Présent dans toutes les grandes rencontres que connaît le Burkina, FESPACO, SIAO, SNC et autres, Ambroise Tapsoba contribue par sa prestance à rehausser des cérémonies qui autrement auraient été bien ternes. Il est capable de résumer un discours de 20mn en 5mn sans pour autant déformer les propos traduits. « Il ne s’agit pas de traduire littéralement un discours mais d’en donner la substance » nous confie-t-il. Et d’ajouter : « Il faut bien s’informer sur le sujet avant la cérémonie et bien écouter les différentes interventions avant de monter à la tribune ; et là il ne faut pas trembler mais plutôt avoir le courage d’interpeller même les autorités, comme si l’on parlait à ses propres frères ».

Ainsi, ce sont de nombreuses astuces qui ont permis à ce maître de la parole de devenir aujourd’hui incontournable dans le milieu très compétitif de la communication. Toujours par monts et par vaux, il est sollicité tant dans les villes que dans les campagnes et même de plus en plus à l’étranger. Mais si sa prestance d’aujourd’hui a comme un goût d’évidence, il a pourtant fallu du chemin et de la ténacité pour l’enfant du petit village de Donssin dans la commune de Loumbila.

Quand Sankara Inoussa inspire Ambroise Tapsoba

« Mes études ont été très brèves », avoue Ambroise Tapsoba. Après l’école primaire de Donssin, il entre au petit séminaire de Pabré mais n’y restera que deux ans. Mais en ce moment déjà il répondait présent à tout ce qui était animation, de kermesse ou de bal. « Je n’avais qu’une seule envie, devenir animateur radio » avoue-t-il. « A l’époque, les animateurs radios étaient de véritables stars et tout le monde cherchait à les voir » souligne-t-il.C’est donc naturellement que lors d’une kermesse organisée dans son village, les populations sont sorties nombreuses quand elles ont entendu que l’animateur vedette de l’époque, Sankara Inoussa serait de la partie. Mais à la surprise générale, c’est un autre animateur, du nom de Pivot, qui vint en lieu et place de Sankara Inoussa.

Les organisateurs encadrèrent la photo de ce dernier et la déposèrent au milieu de l’assistance pour que les gens puissent voir ce à quoi ressemble leur idole, afin de les contenter quelque peu. C’est le déclic pour le jeune Ambroise. Un homme qui par la maîtrise de la langue, en l’occurrence le mooré, est capable de déchaîner autant les foules et dont on est obligé de montrer la photo pour les calmer ! La décision d’Ambroise Tapsoba est prise : « Je deviendrai comme lui ».

Des débuts en dents de scie

Alors qu’il était monté à Ouagadougou où il travaillait dans le bâtiment avec un tâcheron, Ambroise Tapsoba entendit parler d’un test de recrutement que lançait la radio nationale. C’était en 1981. Seul problème à cette bonne nouvelle, le niveau requis pour postuler était le BEPC. Mais qu’à cela ne tienne ; Ambroise déposera son dossier de candidature avec une attestation de niveau à défaut du diplôme. « Il y avait plus de 200 candidats et certains venaient en voiture et d’autres à moto, alors qu’avec un ami nous étions pratiquement les seuls à venir à vélo », nous explique t-il. « Mon ami voulut qu’on s’en retourne mais je dis non », ajoute le déterminé. Il prit donc part à ce test mais fut classé cinquième alors que la Radio ne voulait que deux personnes. Ambroise Tapsoba était donc sur la liste d’attente.

Cinquième sur plus de 200, rien en somme qui fasse pâlir ou décourager notre bonhomme. Bien au contraire, il se dit que c’était un bon début. Seule ombre au tableau, les sarcasmes de certaines personnes de son entourage qui lui sortaient des propos du genre : « Tu crois que tout le monde peut devenir animateur ? ». Mais très vite beaucoup comprendront qu’Ambroise Tapsoba n’est pas « tout le monde ». La radio fît appel aux cinq candidats qui étaient sur la liste d’attente, dont Ambroise, pour un autre test de recrutement. Cette fois ci, les auditeurs ont été invités à voter pour leur animateur préféré. La compétition a consisté en une animation de quelques minutes en direct. En outre la K7 de la compétition a été transmise au secrétaire d’Etat à l’information de l’époque qui n’était nul autre que Thomas Sankara. Ce dernier tombera sous le charme d’Ambroise et cela, joint au plébiscite des auditeurs, permettra au troubadour de faire son entrée à la Radio Nationale du Burkina. Des allers et venus au gré des changements politiques.

L’amitié que portait Thomas Sankara à Ambroise Tapsoba n’a pas toujours été bénéfique à ce dernier. En effet, quand Thomas Sankara a claqué la porte du ministère de l’Information, Ambroise a tout simplement été remercié par la Radio. Il a été rappelé quand Thomas Sankara est revenu au gouvernement. A l’arrestation du capitaine Thomas Sankara, il a encore été remercié. Monsieur Tapsoba sera de la marche pour la libération de celui qui sera plus tard le président de la République. C’est à ce moment que le président lui fera appel, pour la mise en place d’une Direction de la publicité en 1984. Une institution qui deviendra par la suite Zama publicité. Au sein de cette structure Ambroise Tapsoba s’occupera de l’évènementiel ; il réalisera par ailleurs de nombreuses publicités dont il retient de bons souvenirs. « Nous avions vraiment l’amour pour le travail ; ce n’est pas du tout l’argent qui nous guidait », nous confie-t-il, un brin de nostalgie dans sa voix.

Après la privatisation de Zama publicité, Ambroise Tapsoba décida de se lancer dans l’entreprenariat privé avec quelques amis. C’est ainsi qu’ils créèrent “Medias plus International“, en 1988.Cette initiative ne fera pas long feu, du fait de disputes de leadership que regrette l’orateur de talent. En 1971 Ambroise Tapsoba fait partie de l’équipe chargée de la mise en place de la radio Canal Arc en Ciel. A la tête de cette équipe se trouvait le non moins grand orateur Gnama Paco. « C’est quelqu’un qui m’a aidé énormément à travers ses conseils », dit de lui Ambroise Tapsoba.

Le soleil d’Ambroise, entre réalisations et projets

P.D.G de l’Agence conseil en communication “Optima organisation“, Ambroise Tapsoba est devenu un véritable homme d’affaire. Il nourrit de nombreux projets qu’il développe avec sa dizaine d’employés. Déjà, il inaugurera sa propre radio courant février dans la ville de Koudougou. “Tilégré FM“, c’est le nom que portera cette station. Deux projets de magazines sont également à l’étude : un mensuel gratuit sur papier et un magazine télévisuel également mensuel sur la valorisation de l’auto-emploi des jeunes. Son étoile brille aujourd’hui de mille feux.

Sollicité pour des spots, pour des animations ou pour des traductions, il n’en finit pas de bouger et passe le clair de son temps pendu à son téléphone. Son obédience politique est connue de tous. Militant de premier ordre au Congrès pour la Démocratie et le Progrès, il n’entend toutefois pas faire d’amalgame entre son engagement politique et son métier. Et c’est bien connu, on le voit autant dans les manifestations de son parti que dans celles des autres. Pour lui, la politique se doit d’être saine car il s’agit d’un débat d’idées pour un meilleur devenir du Burkina Faso.

Cet esprit rassembleur qui le caractérise, découle sans doute du fait qu’il est issu d’une grande famille. Deuxième d’une famille de huit enfants, Ambroise Tapsoba a lui-même à son tour six enfants. Sa première fille termine son cycle supérieur de finance, tandis que son deuxième emprunte quelque peu les pas de son père. Il est pensionnaire de l’ISTIC, où il apprend la technique radiophonique. « Aucun de mes enfants ne veut tenir le micro comme moi », laisse t-il tomber sans que l’on ne sache réellement s’il le regrette ou s’il s’en réjouit.

Alors qu’il fêtera son 50ème anniversaire le 07 mars prochain, Ambroise Tapsoba rêve de mettre son corps d’athlète au service de l’agriculture. Ses 1m83 de taille et ses 90 kg lui donnent l’apparence d’un vrai lutteur Samo. N’eut été le sourire qui ne quitte presque jamais son visage, il en aurait fait fuir plus d’un. L’agro-business, voici ce qui le tente. Et quand il en parle il devient tout à fait sérieux : « Il faut que dans 5 ou maximum 10 ans, l’on ne soit plus à parler d’autosuffisance alimentaire dans notre pays ». Belle parole de conclusion pour un homme qui ne souhaite présenter à la face du monde que son « burkindi » ; comprenez son intégrité.

Hermann Nazé
Lefaso.net
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24/09/2010
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Ambroise Tapsoba : Et la parole s’est faite homme !

Une maîtrise peu commune du langage parlé“, voici ce qui caractérise ce guerrier de la parole que l’on ne présente plus au pays des Hommes intègres. Maître de cérémonie, animateur, traducteur, homme d’affaires et bientôt patron de presse, Ambroise Tapsoba est tout cela à la fois. Il a le don du verbe, mais pas seulement ; profondément attaché au « burkindi » (intégrité en langue mooré) comme il le dit lui-même, c’est l’élan de solidarité qui le pousse vers ses congénères et qui lui donne cette perpétuelle bonhomie que l’on lit sur son visage.

De nos jours, c’est incontestablement le meilleur traducteur en langue mooré. Ses traductions, appuyées par des proverbes bien à propos et faites avec une certaine emphase sont souvent plus applaudies que les discours eux-mêmes. Présent dans toutes les grandes rencontres que connaît le Burkina, FESPACO, SIAO, SNC et autres, Ambroise Tapsoba contribue par sa prestance à rehausser des cérémonies qui autrement auraient été bien ternes. Il est capable de résumer un discours de 20mn en 5mn sans pour autant déformer les propos traduits. « Il ne s’agit pas de traduire littéralement un discours mais d’en donner la substance » nous confie-t-il. Et d’ajouter : « Il faut bien s’informer sur le sujet avant la cérémonie et bien écouter les différentes interventions avant de monter à la tribune ; et là il ne faut pas trembler mais plutôt avoir le courage d’interpeller même les autorités, comme si l’on parlait à ses propres frères ».

Ainsi, ce sont de nombreuses astuces qui ont permis à ce maître de la parole de devenir aujourd’hui incontournable dans le milieu très compétitif de la communication. Toujours par monts et par vaux, il est sollicité tant dans les villes que dans les campagnes et même de plus en plus à l’étranger. Mais si sa prestance d’aujourd’hui a comme un goût d’évidence, il a pourtant fallu du chemin et de la ténacité pour l’enfant du petit village de Donssin dans la commune de Loumbila.

Quand Sankara Inoussa inspire Ambroise Tapsoba

« Mes études ont été très brèves », avoue Ambroise Tapsoba. Après l’école primaire de Donssin, il entre au petit séminaire de Pabré mais n’y restera que deux ans. Mais en ce moment déjà il répondait présent à tout ce qui était animation, de kermesse ou de bal. « Je n’avais qu’une seule envie, devenir animateur radio » avoue-t-il. « A l’époque, les animateurs radios étaient de véritables stars et tout le monde cherchait à les voir » souligne-t-il.C’est donc naturellement que lors d’une kermesse organisée dans son village, les populations sont sorties nombreuses quand elles ont entendu que l’animateur vedette de l’époque, Sankara Inoussa serait de la partie. Mais à la surprise générale, c’est un autre animateur, du nom de Pivot, qui vint en lieu et place de Sankara Inoussa.

Les organisateurs encadrèrent la photo de ce dernier et la déposèrent au milieu de l’assistance pour que les gens puissent voir ce à quoi ressemble leur idole, afin de les contenter quelque peu. C’est le déclic pour le jeune Ambroise. Un homme qui par la maîtrise de la langue, en l’occurrence le mooré, est capable de déchaîner autant les foules et dont on est obligé de montrer la photo pour les calmer ! La décision d’Ambroise Tapsoba est prise : « Je deviendrai comme lui ».

Des débuts en dents de scie

Alors qu’il était monté à Ouagadougou où il travaillait dans le bâtiment avec un tâcheron, Ambroise Tapsoba entendit parler d’un test de recrutement que lançait la radio nationale. C’était en 1981. Seul problème à cette bonne nouvelle, le niveau requis pour postuler était le BEPC. Mais qu’à cela ne tienne ; Ambroise déposera son dossier de candidature avec une attestation de niveau à défaut du diplôme. « Il y avait plus de 200 candidats et certains venaient en voiture et d’autres à moto, alors qu’avec un ami nous étions pratiquement les seuls à venir à vélo », nous explique t-il. « Mon ami voulut qu’on s’en retourne mais je dis non », ajoute le déterminé. Il prit donc part à ce test mais fut classé cinquième alors que la Radio ne voulait que deux personnes. Ambroise Tapsoba était donc sur la liste d’attente.

Cinquième sur plus de 200, rien en somme qui fasse pâlir ou décourager notre bonhomme. Bien au contraire, il se dit que c’était un bon début. Seule ombre au tableau, les sarcasmes de certaines personnes de son entourage qui lui sortaient des propos du genre : « Tu crois que tout le monde peut devenir animateur ? ». Mais très vite beaucoup comprendront qu’Ambroise Tapsoba n’est pas « tout le monde ». La radio fît appel aux cinq candidats qui étaient sur la liste d’attente, dont Ambroise, pour un autre test de recrutement. Cette fois ci, les auditeurs ont été invités à voter pour leur animateur préféré. La compétition a consisté en une animation de quelques minutes en direct. En outre la K7 de la compétition a été transmise au secrétaire d’Etat à l’information de l’époque qui n’était nul autre que Thomas Sankara. Ce dernier tombera sous le charme d’Ambroise et cela, joint au plébiscite des auditeurs, permettra au troubadour de faire son entrée à la Radio Nationale du Burkina. Des allers et venus au gré des changements politiques.

L’amitié que portait Thomas Sankara à Ambroise Tapsoba n’a pas toujours été bénéfique à ce dernier. En effet, quand Thomas Sankara a claqué la porte du ministère de l’Information, Ambroise a tout simplement été remercié par la Radio. Il a été rappelé quand Thomas Sankara est revenu au gouvernement. A l’arrestation du capitaine Thomas Sankara, il a encore été remercié. Monsieur Tapsoba sera de la marche pour la libération de celui qui sera plus tard le président de la République. C’est à ce moment que le président lui fera appel, pour la mise en place d’une Direction de la publicité en 1984. Une institution qui deviendra par la suite Zama publicité. Au sein de cette structure Ambroise Tapsoba s’occupera de l’évènementiel ; il réalisera par ailleurs de nombreuses publicités dont il retient de bons souvenirs. « Nous avions vraiment l’amour pour le travail ; ce n’est pas du tout l’argent qui nous guidait », nous confie-t-il, un brin de nostalgie dans sa voix.

Après la privatisation de Zama publicité, Ambroise Tapsoba décida de se lancer dans l’entreprenariat privé avec quelques amis. C’est ainsi qu’ils créèrent “Medias plus International“, en 1988.Cette initiative ne fera pas long feu, du fait de disputes de leadership que regrette l’orateur de talent. En 1971 Ambroise Tapsoba fait partie de l’équipe chargée de la mise en place de la radio Canal Arc en Ciel. A la tête de cette équipe se trouvait le non moins grand orateur Gnama Paco. « C’est quelqu’un qui m’a aidé énormément à travers ses conseils », dit de lui Ambroise Tapsoba.

Le soleil d’Ambroise, entre réalisations et projets

P.D.G de l’Agence conseil en communication “Optima organisation“, Ambroise Tapsoba est devenu un véritable homme d’affaire. Il nourrit de nombreux projets qu’il développe avec sa dizaine d’employés. Déjà, il inaugurera sa propre radio courant février dans la ville de Koudougou. “Tilégré FM“, c’est le nom que portera cette station. Deux projets de magazines sont également à l’étude : un mensuel gratuit sur papier et un magazine télévisuel également mensuel sur la valorisation de l’auto-emploi des jeunes. Son étoile brille aujourd’hui de mille feux.

Sollicité pour des spots, pour des animations ou pour des traductions, il n’en finit pas de bouger et passe le clair de son temps pendu à son téléphone. Son obédience politique est connue de tous. Militant de premier ordre au Congrès pour la Démocratie et le Progrès, il n’entend toutefois pas faire d’amalgame entre son engagement politique et son métier. Et c’est bien connu, on le voit autant dans les manifestations de son parti que dans celles des autres. Pour lui, la politique se doit d’être saine car il s’agit d’un débat d’idées pour un meilleur devenir du Burkina Faso.

Cet esprit rassembleur qui le caractérise, découle sans doute du fait qu’il est issu d’une grande famille. Deuxième d’une famille de huit enfants, Ambroise Tapsoba a lui-même à son tour six enfants. Sa première fille termine son cycle supérieur de finance, tandis que son deuxième emprunte quelque peu les pas de son père. Il est pensionnaire de l’ISTIC, où il apprend la technique radiophonique. « Aucun de mes enfants ne veut tenir le micro comme moi », laisse t-il tomber sans que l’on ne sache réellement s’il le regrette ou s’il s’en réjouit.

Alors qu’il fêtera son 50ème anniversaire le 07 mars prochain, Ambroise Tapsoba rêve de mettre son corps d’athlète au service de l’agriculture. Ses 1m83 de taille et ses 90 kg lui donnent l’apparence d’un vrai lutteur Samo. N’eut été le sourire qui ne quitte presque jamais son visage, il en aurait fait fuir plus d’un. L’agro-business, voici ce qui le tente. Et quand il en parle il devient tout à fait sérieux : « Il faut que dans 5 ou maximum 10 ans, l’on ne soit plus à parler d’autosuffisance alimentaire dans notre pays ». Belle parole de conclusion pour un homme qui ne souhaite présenter à la face du monde que son « burkindi » ; comprenez son intégrité.

Hermann Nazé
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24/09/2010
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Ousmane Sow, ou le sculpteur intellectuel

Il est venu à la sculpture, comme l’eau coule de source. Parti de son Sénégal natal, il conquiert le monde avec ses expositions et n’en finit pas de recevoir des commandes. Ousmane Sow, parrain de la 11ème édition du Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou, est l’un des artisans les plus célèbres au monde ; une célébrité qui dure tellement que s’en devient presque une évidence.
C’est à l’école primaire, dans les cours de travaux manuels que le jeune Ousmane Sow, apprendra à se servir de ses mains et de ses dix doigts. Il se montrera très doué pour la sculpture, mais pas seulement. De ses doigts, il apprendra à soigner des malades également. En effet en 1957, Ousmane Sow quitte le Senegal pour la France, alors qu’il a 22 ans. Là, il faira des études de kinésithérapie. En 1965, il retournera à Dakar et mettra en place le service de kiné de l’hôpital Le Dantec. Pendant 30 ans, ses doigts de magiciens lui serviront, et à prendre soins de ses malades, et à sculpter des œuvres d’arts, impressionnants de qualité et faisant l’unanimité dans le monde entier. Mais, les commandes et les demandes d’exposition se faisant de plus en plus nombreuses, Ousmane Saw, dut abandonner complètement la blouse blanche du médecin, pour ne se contenter que de la blouse bleue de l’artisan.
Sa première exposition eut lieu en 1998, dans les stations services de Dakar, suivront rapidement beaucoup d’autres, à Paris, à Londres, un peu partout en Europe, puis aux Etats-Unis d’Amérique et même en Asie. Et l’artiste n’attend pas s’arrêter là. D’ici la fin de ce mois de novembre, il procèdera à l’installation de la statue du Général De Gaulles qu’il a réalisée, à Versailles en France. Un chef d’oeuvre qui trouve un très bon écho dans toute la presse européenne.

En décembre, c’est la statue du monument vivant, Nelson Mandela, qu’il installera également à Paris. Ousmane Sow est un Homme dont la réputation dépasse toutes les frontières. Mais cela ne lui fait pas avoir la grosse tête. Il travaille toujours dans son atelier à Dakar, où, dit-il, il trouve sa source d’inspiration. A 73 ans, Ousmane Sow sursaute quand on lui parle de prendre sa retraite ; cette idée ne l’effleure pas le moins du monde car il a encore beaucoup de projets à mener à bien.

Divorcé et père d’un garçon et d’une fille, le travail ne l’empêche pas d’avoir une vie de famille ; c’est une question de planification, nous dit-il. La famille est très importante pour ce monsieur issu d’une grande famille de 10 enfants. Son père entrepreneur dans le secteur du transport routier et sa maman femme au foyer n’auraient sûrement pas pu imaginer que leur enfant marcherait aujourd’hui sur le toit du monde. Il a d’ailleurs un regard assez désabusé sur ce monde dans le quel nous sommes ; un monde qui de son avis, est fait d’égoïsme et de clivages entre d’un coté les riches qui méprisent les pauvres et d’autre part les pauvres qui deviennent de plus en plus pauvres. Il a toutefois bon espoir que la crise financière que connaît le monde aujourd’hui contribue à faire prendre conscience aux uns et aux autres de l’absurdité de la situation.

Un franc parler qui dérange parfois, c’est le principal défaut que l’on peut attribuer à l’homme qui est très critique sur les dirigeants actuels du continent. Au journaliste du journal “Le Monde“, qui lui demandait pourquoi il avait sculpté le Général De Gaulle, les poches plates, il répondait : « De Gaulle ne traînait pas de casseroles. Il n’a rien mis dans ses poches, contrairement à certains chefs d’Etat africains. Ceux-là, si je les sculptais, c’est des besaces pleines que je leur ferais, et des deux côtés ».

Ousmane Sow, en dehors de la sculpture, se passionne également par la musique ; il en écoute beaucoup et joue lui-même du piano. Grand sportif également, il ne manque pas de faire un tour chaque matin dans son gymnase. Environ deux mètres de taille et très large des épaules, il fait immédiatement pensé à un lutteur traditionnel, comme seul le Senegal sait en faire. Sa barbe blanche et abondante nous renvoie par ailleurs à l’image d’un patriarche africain plein de sagesse. C’est ce grand monsieur, parrain du SIAO 2008 qui s’en est d’ailleurs dit très honoré, que nous avons rencontré dans le salon d’honneur de l’aéroport international de Ouagadougou, alors qu’il attendait son avion pour aller vers d’autres cieux montrer ce qu’un africain peut apporter au monde.C’est le regard admiratif, la poitrine bombée de fierté que nous disons bonne continuation Monsieur Sow et vivement que vous suscitiez des vocations.

Hermann Nazé

Lefaso.net

24/09/2010
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François 1er : Le Burkinabè qui bouscule la mode européenne

Parti du Burkina en 1969, c'est un périple fait de lauriers mais aussi de labeurs qui conduira François 1er dans le domaine très sélect de la mode européenne. L'un des quelques rares noirs à réussir ce pari, l'homme n'en prend toutefois pas la grosse tête, chaque deux mois environ, l'artiste revient se ressourcer au Burkina et même, il vient d'y ouvrir un atelier de production.

Ces vêtements sont vendus partout en Europe. De la France où il est installé, François 1er de son vrai nom François Yaméogo est un véritable ambassadeur de la culture. Ses productions vestimentaires en Faso dan fani et autres matériaux du Burkina s'arrachent comme "des bouteilles d'eau en période de sécheresse". Il possède aujourd'hui un atelier de production et une boutique de vente à Paris, qui emploie six personnes. Vous l'imaginez peut-être ; il a fallu du chemin et de la combativité pour en arriver là, d'autant plus que son séjour à l'école ne fût pas très long.

C'est l'école Centre de Koudougou qui accueille François Yaméogo en 1961. Il y fera son école primaire jusqu'en 1968. Après l'école primaire, le jeune François quittera sa ville natale de Koudougou pour la Côte d'Ivoire. Il fera la dure expérience des petits boulots que bien de Burkinabè vivent au bord de la lagune Ebrié à cette époque. C'est là qu'il découvrira le monde de la couture et de la mode. Pendant 5 ans, il apprendra et se découvrira en même temps qu'un grand intérêt, un don pour la confection de vêtements.

Mais la soif de l'aventure et le perpétuel désir de découvrir d'autres cultures et façons de faire le pousseront à quitter la Côte d'Ivoire pour le Sénégal en 1974. Là, il se perfectionne pendant quatre ans auprès des meilleurs couturiers de la capitale sénégalaise. Mais il faut croire qu'il est destiné à de plus grandes tâches. Cette fois ci, c'est la France qui l'accueille, et nous sommes en 1978.

Dur dur pour un africain de se faire un trou en France. François Yaméogo en fera la dure expérience. « J'ai connu des moments très très difficiles », avouera t-il. Le revoilà qui renoue avec les petits boulots, avec en prime les éternelles tracasseries liées au "papier". Mais monsieur Yaméogo est déterminé et garde en tête son premier objectif, qui est de se faire un nom dans le monde très select de la mode, qui plus est, la mode européenne. Pour ce faire, il suivra des cours de modélistes et stylistes.

Le succès au bout de l'effort

Le talent étant en lui-même une publicité, plusieurs sociétés très renommées se disputeront les services du burkinabè. Il occupera plusieurs postes de responsabilités comme celui de chef de production au "Sun City", puis à la "GSD DNL", tous des références de la mode européenne à l'époque, avant de créer sa propre marque en 1992. Ce label, il le nommera François i, faisant référence à son propre patronyme qui est Yaméogo. Mais, parce que la voyelle i, est écrite en majuscule, les clients qui pensaient qu'il s'agissait du chiffre 1, ce sont mis à l'appeler François 1er ; d'où le nom de cette célèbre marque qui ne cesse de se répandre partout en Europe.

François 1er débutera avec une ligne jeune et sexy, un style dit "plutôt dans la maille". Mais très vite il diversifiera ses offres ; Il se lancera alors dans la création de ligne de sportwear, des joggings, des sweet, et cela jusqu'en 2000. C'est à cette époque que naîtra sa collection destinée aux femmes, faite de jupes, de tailleurs, de robes, et autres parures féminines. C'est cette ligne quia connu un véritable succès au dernier SIAO.

Pas facile, la vie de famille…

Divorcé à plusieurs reprises, François 1er n'est pas très prolixe sur cette partie de sa vie. Il l'explique par le fait que le métier de la mode est très prenant. Toutefois, cet amoureux de la mode est heureux père de trois garçons dont l'aîné a 26 ans et le cadet 8. Quant à savoir s'il aimerait que ses enfants fassent le même métier que lui, monsieur Yaméogo est catégorique : "Le même métier, mais pas la même chose". Il espère que le label François 1er qu'il a créé puisse grandir et conquérir beaucoup plus d'espace. Il espère que ces enfants puissent y contribuer, sans que ce ne soit pour lui une impérative nécessité.

La famille est quelque est une chose qui détermine cet artiste au grand cœur ; issu d'une grande famille de près de 50 enfants, il en a gardé l'esprit de partage qui le caractérise. « Comprenez que l'on ne peut pas être issu d'une telle famille et ne pas aimer partager », confiera t-il. Il est en effet difficile de faire preuve d'égoïsme ou de jalousie dans de tels cas. Cet esprit de partage et de famille peut d'ailleurs s'avérer être un handicap, comme nous le souligne l'artiste : « Parce que l'on est habitué à l'esprit de famille, on n'arrive pas à se passer des autres, on a toujours envie de les impliquer, alors qu'eux ne sont pas dérangés de vous écarter ».

Patriote convaincu, François 1er sursaute à la moindre évocation du nom "Burkina Faso". Il veut apporter son concours au développement du pays. Sa première phrase, quand nous l'avons rencontré fût : « Il faut que chaque Burkinabè, au niveau de compétence qui est le sien, de l'intérieur ou de l'extérieur, puisse contribuer de façon efficace au développement de son pays, et que cette contribution soit reconnue ».

Depuis peu, François 1er a mis en place un atelier de production à Ouagadougou. Il avoue qu'au départ, les productions de cet atelier étaient destinées à l'exportation, mais au vu de la demande sur place, il s'est vu obligé, mais heureux, de pouvoir les satisfaire. Cet atelier à Ouagadougou emploie 15 personnes. Quant à savoir quel projet nourrit notre "roi de France", il répond sourire aux lèvres : "Aller à 20 km de Koudougou, sur 10ha, élever des chèvres et des chevaux".

C'est un Homme qui donne beaucoup de lui-même, que nous avons laissé dans un de ses deux stands au SIAO, entouré de clients mais aussi de partenaires, et d'admirateurs venus le féliciter pour son travail. Ces dernières paroles lourdes de sens sont : "chaque deux mois je reviens au Burkina, parce que c'est là que je retrouve la créativité et l'imagination. En Europe, l'industrialisation a pris le pas sur la créativité, ce qui me fait penser que l'avenir de la mode est africain".

Hermann Nazé

Lefaso.net
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24/09/2010
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